Actualités
17 - 12 - 2015
C'est la fin d'un parcours de près de 15 mois qui s'est achevé ce matin, en moins d'une heure, dans un hémicycle presque vide. Le projet de loi de modernisation de notre système de santé a été adopté par les députés en lecture définitive, lors d'un vote à main levée.
Quelques heures avant le vote, le député Jean-Pierre Door s'est indigné des conditions dans lesquelles s'est déroulé cette séance. "On nous a refusé un vote solennel. Au lieu de ça, c'est un vote en catimini, à main levée au cours duquel le droit de parole sera de 5 minutes ! Est-ce normal ?", s'est interrogé le député. "Il n'y avait pas d'urgence. Ce vote aurait pu avoir lieu à la rentrée. A la veille des élections des présidents des conseils régionaux, beaucoup de députés sont en région", a rappelé Jean-Pierre Door, lui-même absent de l'hémicycle.
Dès l'aube, à l'extérieur de l'Assemblée nationale, une quarantaine de professionnels de santé s'étaient rassemblés à l'appel de l'UFML et le soutien de nombreux syndicats, dont la FMF, le SML et Le Bloc. Ils ont interpellé plusieurs députés avant que ces derniers ne gagnent l'Assemblée. Médecins, infirmiers, kinés et autres professionnels de santé étaient vêtus de noir, portant le deuil du système de santé. De nombreux bouquets de chrysanthèmes disposés en forme de croix ornaient la place, à l'entrée du Palais Bourbon.
"Le vote de la loi de Santé équivaut à signer l'avis de décès de la médecine libérale, et à signer un contrat qui nous lie désormais avec les députés responsables : un contrat d'opposition. Ils prennent la responsabilité, en conscience, d'éradiquer notre mode de vie, nos valeurs éthiques et déontologiques, de voler notre avenir...", a déploré le président de l'UFML, le Dr Jérôme Marty.
"Je sais que les médecins sont inquiets"
Défendant une dernière fois son texte, Marisol Touraine s'est attachée à souligner -devant une petite poignée de députés présents- que cette loi permettrait de "réduire les inégalités en matière de santé", de "moderniser un système dont la transformation est incontournable" et de"développer la médecine de ville autour de la coordination et du travail en équipe".
Les quelques députés de l'opposition présents se sont fait entendre en protestant à haute voix dès que la ministre vantait la généralisation du tiers payant ou assurait que le temps du débat avait été pris."Ceux qui veulent faire en sorte d'oublier ce travail n'auront pas raison ! Comment dire qu'il y a passage en force alors que le texte a été présenté en octobre 2014 ? Dire qu'il n'y a rien sur l'ambulatoire, c'est que vous n'avez pas suivi les débats. C'est tout le rapport à la proximité qui est réinventé pour plus de simplicité et de rapidité. C'est une chance à saisir pour les professionnels de santé. Je sais qu'ils sont inquiets face aux évolutions, aux pressions des patients, au sentiment de dégradation de leur reconnaissance et de leurs conditions de travail",a martelé la ministre.
De son côté, la présidente de la Commission des affaires sociales, Catherine Lemorton, a tenu à souligner qu'elle avait reçu de nombreux courriers de félicitations pour cette loi de santé. Par ailleurs, elle a indiqué qu'elle aussi avait entendu les manifestants, réunis devant l'Assemblée, avant d'ajouter :"Les syndicats représentatifs de médecins n'y sont pas. Ils sont dans leurs cabinets, en train de soigner les patients."Petite pique à laquelle les manifestants ont aussitôt répondu :"La FMF et le FSDL sont représentatifs et sont devant l'AN. Encore une erreur de @CathLEMORTON"
Un recours devant le Conseil constitutionnel
Au sein de l'opposition, les députés Laurent Wauquiez, Christian Jacob, Eric Woerth et de Bernard Accoyer étaient notamment présents. Ce dernier a pris la parole avant le vote pour demander une interruption de séance. "Il faut que la concertation puisse enfin s'ouvrir avec les professionnels de santé !, a demandé Bernard Accoyer. Nous sommes bâillonnés dans ce débat !" Les députés de l'opposition ont annoncé le dépôt d'un recours devant le Conseil constitutionnel. Les sages ont un mois pour remettre leur avis.
En attendant, la CSMF a appelé à la "désobéissance civile". "La CSMF continuera de refuser la mise en place d’un tiers payant généralisé, mesure dogmatique, bureaucratique, complexe, et qui ouvre la porte aux assureurs complémentaires", indiquait la Confédération dans un communiqué, appelant les médecins à ne pas appliquer le tiers payant.
Article repris d'EGORA : LOI DE SANTÉ par F. Na le 17-12-2015